Julie LOCKERT-DELPUECH                         Académie de Rennes

                                                               Site de Saint-Brieuc                  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Efficacité et limites du jeu comme outil pédagogique 

Un exemple : les mathématiques en Cycle 2

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CERPE

Concours Externe de Professeur des Ecoles


SOMMAIRE

 

 

Introduction  ……………………………………………………………………………………………..3

 

I . Apports théoriques   ……………………………………………………………….5                               

 

1.1.     Le jeu : essai de définition…………………………………………………..5

 

1.2.     L’enfant du début de cycle 2…………………………………………… 7

 

1.3.     Le jeu comme médiateur de l’apprentissage  ……………8

 

1.3.1.    intégration par le jeu, introduction à d’autres réussites…………………………..8

1.3.2.    apprentissage de la discipline morale , éducation à la citoyenneté………….9

1.3.3.    une nouvelle approche………………………………………………………………………………10

1.3.4.    un climat affectif propre aux apprentissages…………………………………………..10

1.3.5.    donner un sens à la notion travaillée……………………………………………………….11

1.3.6.    « le jeu est partie intégrante de la croissance de l’enfant » ………………….12

 

1.4.     Conclusion  ………………………………………………………………………………13

 

II . La mise en place du jeu à l’école …………………………14

 

 

2.1.     Présentation, situation des séances dans la progression, objectifs  ……………………………………………………….14

 

2.2.        Séance 1 menée avec le premier groupe……………………..16

Déroulement, analyse

 

2.3.     Séance 1 menée avec le deuxième groupe………………….. 21

Déroulement, analyse

 

2.4.     Séance 2, trois semaines plus tard……………………………….. 24

 

2.5.     Evaluation et bilan………………………………………………………………… 25

 

III. Les limites du jeu…………………………………………………………….. 24

 

3.1.     les difficultés liées à sa mise en place …………………………26

3.2.     remédiations possibles…………………………………………………………..27

3.3.     les limites inhérentes au jeu……………………………………………….27

 

Conclusion  …………………………………………………………………………………………………..29

Bibliographie ………………………………………………………………………………………………..30

 

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

Comme le recommandent les textes officiels, les enseignants doivent savoir varier les activités et l’organisation de leur classe. Le jeu est l’un des moyens d’y parvenir. Le jeu en classe ne s’oppose pas au travail : au contraire, il peut être un outil pour l’enseignant, qui doit pouvoir et savoir l’utiliser à bon escient, c’est à dire quand il est susceptible d’apporter quelque chose aux élèves. En effet, le jeu à l’école n’est pas gratuit, il est un substitut de travail et non une distraction. L’utilisation du jeu comme outil pédagogique signifie donc que l’on ne doit pas s’en servir de manière hasardeuse mais qu’il doit être mis en place dans une situation d’apprentissage. L’enseignant doit, en outre, savoir gérer la situation et le déroulement du jeu pour que celui-ci porte ses fruits.

Mes observations, effectuées lors de contacts avec les classes d’école primaire, m’ont permis d’apprécier quelques utilisations possibles de jeux à l’école et les résultats conséquents. En effet, au début du cycle 2, l’approche ludique de certaines notions m’a semblé être un bon outil pédagogique.

Dans un premier temps, nous aborderons donc la valeur pédagogique du jeu à l’école à travers diverses entrées. D’un point de vue purement théorique, il faut savoir que le jeu participe activement au développement de l’enfant, qu’il peut également être un mode d’intégration et une forme d’initiation à la citoyenneté. Le jeu à l’école est également une manière d’apporter du sens à certaines notions, d’attirer l’attention des élèves, et de ce fait de les aider à mieux les comprendre et les retenir.

L’aspect ludique permet aussi aux enfants de travailler ou d’approcher une notion ou matière sans y percevoir la notion de contrainte généralement liée à l’école : pour les élèves qui font des blocages lorsqu’il s’agit d’activités dites ‘scolaires’, le jeu peut apparaître comme libérateur. Le jeu permet aussi une approche différente de certains objectifs : il permet de fournir aux élèves d'autres représentations de la notion étudiée et des situations d’apprentissage différentes. Enfin , le jeu, nécessitant un état d’esprit compétitif (même si cela varie en fonction de la nature du jeu et de ses buts) est en ce sens une motivation efficace.

La deuxième partie concerne plus directement mes observations et interventions dans une classe : elles se basent sur la mise en place d'une séquence sur la décomposition des nombres amenant à l'introduction de l'addition dans une classe de Grande Section de Maternelle, au mois d'avril.

Mener ces séances m’a permis de constater immédiatement qu’il ne fallait laisser aucune part au hasard au cours de la préparation du jeu, particulièrement dans la gestion de groupe (homogène, hétérogène, grand ou petit groupe…), du temps et du matériel. Le rôle du maître au cours de la séance est important également puisqu’il anime le jeu tout en ayant un objectif précis en tête.

Enfin, alors que la première partie tend à montrer l’efficacité du jeu en classe, la dernière nuancera ce propos : il faut savoir utiliser et considérer le jeu comme un outil pédagogique parmi d’autres. En effet, il peut poser parfois des problèmes selon les élèves, les enseignants et les situations. Les observations effectuées lors des séances de mathématiques ont révélé ainsi plusieurs difficultés dans son utilisation, liées à la gestion de classe, ou proprement inhérentes au jeu. Toutefois, certaines remédiations peuvent être envisagées afin de tirer le meilleur profit possible du jeu à l’école, ce profit étant l’objectif de tout enseignement : un apprentissage efficace pour des résultats optimaux.

 

I. Apports théoriques

 

1.1.      Le jeu : essai de définition

 

Nous n’allons pas ici tenter de définir le jeu de manière exhaustive. En effet, le concept de jeu recouvre de multiple acceptions. Partant d'un sens très général, nous essaierons simplement ici de donner une définition qui nous amènera au type de jeu particulier auquel nous nous référons dans la problématique (l’utilisation du jeu comme outil pédagogique).

Si l’on se limite à la définition du dictionnaire, Petit Robert 1993, le jeu est « une activité physique ou mentale purement gratuite, qui n’a dans la conscience de la personne, qui s’y livre, d’autre but que le plaisir qu’elle procure ». Jean CHATEAU, dans Le réel et l’imaginaire dans le jeu de l’enfant, reprend d’ailleurs ce point : « le jeu est une exploration à la fois gratuite et source de jouissance ».

Aussi peut-on emprunter au philosophe Huizinga une définition plus complète : « le jeu est une action volontaire accomplie dans certaines limites fixées de temps et de lieu, suivant une règle librement consentie mais complètement impérieuse, pourvue d’une fin en soi, accompagnée d’un sentiment de tension ou de joie et d’une conscience d’être ‘autrement’ que dans la vie courante ». (Homo Ludens).

Le plaisir, le respect des règles, le but à atteindre sont donc quelques points permettant de définir le jeu.

Nous pouvons également ajouter que de ces jeux se dégage le besoin de l’enfant de s’exercer tout en se pliant aux règles préalablement définies.

Si l’enfant reste libre à chaque moment de s’investir ou non dans le jeu –sauf dans certains cas que nous verrons plus loin-, s’il recherche avant tout du plaisir, il n’en reste pas moins que celui-ci a de nombreuses vertus. En effet le jeu, selon la forme qu'il prend, peut  permettre :

Ø      du point de vue affectif :  

§         de se décentrer ("d’être autrement que dans la vie courante")

§         de vivre la position de leader à un moment ou à un autre

§         de multiplier les contacts avec les autres enfants

§         d’apprendre à s'entendre avec les autres

§         de découvrir la règle à travers une relation toute différente de celle qu’il connaît habituellement avec l’adulte

Ø      du point de vue moteur :

§         d'évaluer ses compétences et d'être fortement motivé pour les dépasser

§         de lui fournir l'occasion de perfectionner son habileté

Ødu point de vue cognitif:

§         d'augmenter sa connaissance de l'environnement

§         de s'exprimer, de communiquer

§         de s'exercer dans le domaine opératoire

§         d'apprendre à maîtriser le symbole

§         d'exercer son imagination

Si l'on considère toutes ces définitions et ces différents paramètres, le jeu est une activité qui, tout en ayant  des règles bien définies, est fortement liée à la notion de plaisir. Mais le jeu, dans sa diversité –qu'il soit d'intérieur ou d'extérieur, collectif ou individuel, qu'il ait lieu dans le milieu familial, scolaire ou dans une autre structure, qu'il soit "un grand classique" ou  inventé par l'enfant lui-même-, a aussi  une fonction importante dans le développement de l'enfant, tant au niveau physique qu'au niveau intellectuel.

Cependant, le type de jeu exploité en pédagogie – ici en mathématiques- revêt des aspects spécifiques. En effet, pour avoir sa place en classe, le jeu doit posséder le maximum des différents intérêts pédagogiques évoqués ci-dessus, tout en restant un jeu. Pour cela, il lui faut combiner au moins quelques unes des caractéristiques suivantes:

§         posséder des règles préalablement définies, lesquelles doivent être respectées par tous

§         être collectif

§         le maître, du moins pendant le déroulement du jeu, doit avoir un rôle d'animateur

§         le but du jeu doit être clairement défini

§         il doit y avoir un vainqueur

§         il peut y avoir constitution d'équipes (afin qu'il y ait collaboration entre les membres de chacune d'elles)

Et bien entendu, même s'il doit, malgré les contraintes des règles et de la vie scolaire, rester un plaisir, il est essentiel que le jeu s'intègre dans un processus d'apprentissage, et qu'en aucun cas il ne soit le seul support des séances de mathématiques où, comme dans les autres disciplines, il est essentiel de conserver des situations variées sur des supports diversifiés.

1.2  L'enfant du début de cycle  2

 

Au cours de la tentative de définition du jeu, on rencontre la notion de "développement de l'enfant". Aussi est-il intéressant de préciser quelques points concernant l'enfant de début de cycle 2.

Lorsqu'il entre au début du cycle des apprentissages fondamentaux (cycle 2), l'enfant a généralement 5 ou 6 ans. Les programmes officiels amènent  à privilégier tout au long de ce cycle, lecture, production d'écrits et  calcul, mais ces deux premières années seront cependant utiles pour renforcer des comportements (déjà découverts au cycle des apprentissages premiers, le cycle 1) qui seront acquis à l'issue de ce cycle. C'est ainsi qu'il pourra notamment:

§         écouter les autres et le maître

§         prendre la parole à bon escient

§         respecter les règles de vie au sein de la classe y compris celles liées aux contraintes de certaines activités

§       émettre des suppositions

§         faire des choix et les expliquer

§         contrôler ses réponses par rapport au projet et aux données initiales

§       organiser logiquement son propos pour traduire et commenter ses actions, ses attitudes et ses productions

§         s'exprimer correctement et utiliser une syntaxe plus complète

Signalons également que l'enfant de début de cycle 2 est jeune et que sa capacité de concentration effective n'excède pas quinze minutes par séance. Il faut aussi répondre au besoin de mouvement de l'enfant. Par conséquent il est important de faire varier les activités, sur le fond et sur la forme. A cet âge une place importante est également accordée aux activités permettant d'exercer la mémoire: l'enfant participe à des jeux d'écoute musicale, il mémorise des comptines, des poèmes, des chansons… Enfin, en rapportant les propos de Piaget, on peut ajouter que  l'enfant est en plein apprentissage de la vie en société. Encore égocentrique, l’enfant a du mal à accepter l’autre et à travailler avec lui. Il doit non seulement respecter des règles de vie commune à l’école mais aussi  être capable de comprendre le sens de ces règles. Les jeux "à règles" répondent donc en ce sens de manière tout à fait satisfaisante à l'un des grands objectifs du début de cycle 2: la socialisation.

Ainsi, en mettant l'enfant dans des situations concrètes de jeux, et donc de communication, de vie, d'échanges, le maître va aborder l'apprentissage d'un point de vue notionnel mais aussi comportemental, tout en emportant l'adhésion de l'élève.

1.3   Le jeu comme médiateur de l'apprentissage

1.3.1.  Intégration par le jeu, introduction à d'autres réussites

 

Un enfant en difficulté scolaire peut vivre ses échecs de manière très dure et se sentir différent des autres élèves. Le jeu peut être un moyen de le réintégrer dans le groupe classe:

-         l'aspect social du jeu le pousse à se tourner vers les autres. Parce qu'il a un rôle à jouer dans le jeu, il sent qu'on a besoin de lui.

-         l'objectif pour l'élève n'est pas le même que lors d'une séance classique: il s'agit là de gagner, mais aussi de se faire plaisir…il participera donc plus activement et surtout plus volontairement à la tâche proposée.

-         enfin, la réussite dans le jeu est une forme de réhabilitation et de reconnaissance de ses capacités.

En somme, parce que le jeu permet à l'enfant de se rassurer et de mieux s'intégrer au système classe, il lui redonne confiance en lui. L'importance des encouragements est souvent soulignée, or dans le jeu la réussite est un encouragement en soi. De même l'aspect négatif et culpabilisant de l'échec est moins présent, moins fort dans le jeu: quand l'enfant "échoue"  au jeu, cela ne signifie pas pour lui qu'il n'a pas compris, ou qu'il a mal fait ce qu'on attendait de lui, mais qu'il a tout simplement perdu. La situation est dédramatisée par le caractère ludique de l'activité, l'erreur est permise (parfois même nécessaire dans les jeux qui de par leur nature, désignent obligatoirement un gagnant et un perdant), et l'élève peut et est invité à rejouer. Cette attitude face à l'erreur qu'engendre le jeu est à exploiter car cela peut être une manière de faire comprendre aux élèves qu'un échec n'est pas une condamnation sans appel mais une invitation à poursuivre leurs efforts jusqu'à la réussite.

1.3.2.  Apprentissage de la discipline morale, éducation à la citoyenneté

 

Tout jeu est soumis à des règles que les participants se doivent de respecter. Cette condition est un moyen d'enseigner aux élèves le respect de certaines règles différentes de celles de la vie de tous les jours et de celles de la classe lorsqu'il s'agit des "règles du jeu" proprement dites, mais aussi communes à celles de la vie en société: attendre son tour, accepter de perdre, mais aussi rester modeste en cas de  victoire, ne pas tricher , respecter son adversaire, reconnaître le cas échéant sa supériorité…en bref, apprendre à respecter l'autre et à se respecter soi-même, apprendre à vivre ces sentiments dans le milieu protégé de la classe. Le jeu apparaît donc comme un moyen d'élargir l'éducation à la citoyenneté prônée dans les programmes officiels de manière variée.

1.3.3.  Une nouvelle approche

 

Il est fortement conseillé aux enseignants de varier l'organisation de leur classe, leurs activités ainsi que l'approche de certaines notions ou matières. Cette nécessité de diversification peut, d'une part, être expliquée par le besoin de changement pour l'enfant, afin d'éviter qu'il ne se disperse lorsqu'il n'arrive plus à se concentrer: si une situation d'apprentissage, quelle qu'elle soit, est répétée de manière trop fréquente, un phénomène de lassitude s'installe qui finalement porte préjudice à l'apprentissage des notions abordées au travers de la tâche. D'autre part, il convient également d'aborder ici la notion de transfert: l'utilisation du jeu permet de travailler avec certains instruments habituellement utilisés dans un contexte différent. Cela fournit à l'élève de nouvelles représentations ou, selon le cas, renforce celles qu'il avait acquises lors d'activités précédentes. Un nouvel enjeu et une nouvelle forme d'activité sont susceptibles en effet de relancer la motivation de l'élève, et peuvent permettre à l'enseignant de vérifier que ce dernier a acquis les savoirs escomptés de manière suffisamment approfondie pour savoir les réutiliser dans des situations différentes de celle de l'apprentissage.

1.3.4.  Le jeu apporte un climat affectif propre aux apprentissages

 

Il arrive que certains élèves fassent des blocages face à des activités dites 'scolaires'. Dans cette situation le jeu peut apparaître comme libérateur dans le sens où pour ces enfants, le jeu ne peut pas être synonyme de travail. Dans le même esprit, le jeu n'est pas obligatoirement utilisé pour introduire ou réinvestir une notion: il peut aussi servir à rassembler les enfants entre deux activités plus scolaires, leur permettre de se détendre.

En outre, l'une des caractéristiques de l'enfance est le fait d'être toujours à la recherche du plaisir. Il trouve ce plaisir dans le jeu, même si celui-ci a lieu dans un contexte scolaire. En effet, le jeu, de par la multitude d'aspects qu'il peut revêtir, est source de plaisirs de différentes natures:

-    pendant le jeu: l'enfant prend des risques, dépasse ses limites, progresse à la fois dans ses attitudes et aptitudes, s'adapte aux situations, réinvestit des savoirs, savoir-faire et savoir-être. Enfin et surtout, l'enfant prend plaisir à exercer certaines de ses qualités physiques ou intellectuelles (habileté, adresse, rapidité…)

-    à la fin du jeu: l'enfant ressent le plaisir d'avoir accompli ce qu'on lui avait demandé, et éventuellement d'avoir gagné, et apprécie la mise en valeur qui en découle.

1.3.5.  Donner un sens à la matière travaillée

 

La notion  de motivation est essentielle dans l'enseignement. Or lorsque l'élève ne saisit pas le sens d'une activité, autrement dit l'intérêt qu'elle présente pour lui, sa motivation risque d'être fortement réduite et transformée en une désagréable sensation d'obligation de travail. Quand un enseignant décide de travailler une matière ou une notion quelconque, il ne le fait jamais au hasard mais a un objectif d'apprentissage précis: il ne peut cependant pas toujours expliciter son but à ses élèves ( car cela serait trop difficile à comprendre ou trop éloigné de leurs centres d'intérêt ) ou parfois ne désire pas le faire, cela faisant partie d'une stratégie d'enseignement particulière.  Dans ces différents cas, si l'enseignant veut motiver ses élèves et obtenir d'eux des résultats, il doit trouver un moyen de donner malgré tout du sens à l'activité qu'il leur propose… et le jeu peut être un de ces moyens, pour capter l'attention des élèves, les motiver. En effet, ils y voient l'occasion de s'amuser, de montrer leur capacité à gagner, à réussir ce qu'il leur est demandé et pour cela, ils utilisent les instruments qui sont à leur disposition, à savoir la notion que l'enseignant veut leur faire découvrir ou réinvestir; ils n'étudient donc pas au premier abord la notion présentée pour elle même, mais s'en servent comme d'un outil pour atteindre le but qu'ils se sont fixé: jouer et gagner. En effet, l'effort  que les élèves auraient fourni lors d'une séance "normale" sur la connaissance à acquérir se retrouve dans le jeu également: à la différence qu'il est accepté, désiré, aimé. Le jeu apparaît donc comme une sorte d'accroche, d'habillage à l'acquisition de certains savoirs.

Il est également important de noter que la motivation qui anime l'élève provient à la fois de la jouissance promise liée au fait de jouer et de la victoire possible, qui le mettra en valeur, qui lui prouvera qu'il a dépassé ses limites (et donc qu'il a "grandi"). Ce type de motivation peut être renforcé par la mise en jeu d'une récompense, d'un prix…même si la motivation est déjà grande à l'idée de montrer à tous (au maître mais aussi aux autres élèves) que l'on a gagné, que l'on est allé "jusqu'au bout". Enfin, l'aspect compétitif est très stimulant dans le sens où certains enfants ne cherchent pas à dépasser leurs propres limites mais se mobilisent par contre très fortement pour dépasser les autres, être le premier, le "plus fort".

Ainsi donc le jeu aide à donner du sens et motive, de par sa nature, les apprenants. Le sens et la motivation ont un rôle essentiel dans la capacité de l'enfant à être attentif donc à comprendre et à retenir.

1.3.6.  « le jeu est partie intégrante de l'enfant »

 

Selon Jean CHATEAU, le jeu est étroitement lié au développement de l’enfant : lorsqu’il joue, l’enfant se concentre et s’implique, il prend très au sérieux l’activité ludique proposée. Ainsi, jouer implique de réfléchir, de prendre en compte ses partenaires et ses adversaires, d’anticiper leur stratégie ou réactions, tout en devant soi-même élaborer sa propre stratégie. De plus, dans la situation de jeu, l’enfant jouit d’une plus grande liberté d’action que dans sa vie quotidienne, et cela lui permet de mettre en place certaines expériences qu’il n’aurait pas l’occasion de réaliser dans d’autres circonstances. Ainsi, l’enfant se crée une démarche d’apprentissage : il découvre, essaye, réessaye, réinvestit ce qu’il a acquis ou recommence s’il s’est trompé, mémorise…et à travers ce processus, l’enfant fait peu à peu son chemin vers l’abstrait, étape importante de son développement psychologique.

Le jeu peut également être défini dans les termes suivants :  jouissance, nouveauté et exercice, qui sont trois principes essentiels dans la vie de l’enfant et qui lui permettent la construction de sa personnalité et son développement intellectuel.

En outre, le jeu permet à l’enfant d’entrer dans un système de communication dans lequel il intervient, dans lequel ils peut associer le dire et le faire. Cela lui permet d’élaborer un système de relations qui varient et le placent dans diverses situations : il peut être simple acteur, à égalité avec les adultes selon  le jeu (aux jeux de hasard, par exemple), ou encore meneur, bouleversant alors l'ordre établi habituellement dans la classe. Cette situation "interactive" permet à l'élève tantôt d'apprendre, en bénéficiant d'un soutien en général apporté par l'adulte – mais il peut aussi venir d'autres élèves - , tantôt de transférer ses acquis.

Ces notions d'interaction et de communication nous renvoient directement à l'aspect social du jeu: le jeu, à l'école comme ailleurs, favorise le contact avec l'autre. Comme nous l'avons dit, l'enfant doit prendre en compte l'existence de ses partenaires et de ses adversaires, comprendre leur rôle, tenter de prévoir leurs actions. Cela signifie aussi qu'il se doit d'établir des relations d'opposition ou de coopération avec les autres enfants et agir en conséquence de ces liens. Il a un rôle à tenir. Le respect de la règle et des autres joueurs est également fondamental: il doit tenir compte du point de vue des autres mais aussi de leurs droits (accepter de perdre, savoir attendre son tour).

1.4   Conclusion

 

Le jeu apparaît donc ici comme un outil particulièrement approprié aux apprentissages scolaires. Cependant tout outil n'est efficace qu'à la condition d'être correctement utilisé, et ce principe est tout aussi valable pour le jeu. En effet, celui ci demande une mise en place souvent complexe, qui doit prendre en compte diverses contraintes: la gestion du groupe, du temps, de l'espace, du matériel et le rôle du maître notamment. Ceci m'est apparu de manière plus évidente encore lors des séances que j'ai menées en classe.


 

II. La mise en place du jeu à l'école

 

Cette partie se base sur le compte-rendu de séances de mathématiques que j'ai eu l'occasion de mener en Grande Section de maternelle. La séquence a lieu au mois d'avril et a pour objectif la poursuite de l'apprentissage de la décomposition des nombres jusqu'à 10 et par là même l'introduction de l'addition : elle se compose  de séances menées par l'institutrice pour introduire le signe "+", d'ateliers de travail individuel de manipulation, de séances d'entraînement par un jeu collectif  (le "loto des additions") et d’une évaluation individuelle reprenant le principe du jeu.

 

2.1.  Présentation, situation des séances de jeu dans la progression, objectifs

 

Cette classe de Grande Section fait partie d'une école proche du centre ville d'une agglomération de taille moyenne. Elle se compose de 16 élèves. Au mois d'avril, tous les nombres jusqu'à 9 ont été étudiés, ainsi que leurs décompositions. Après discussion avec l'institutrice, il est apparu qu'après avoir vu le nombre 10, un travail global sur la décomposition des nombres et, à cette occasion, une introduction à l'addition seraient pertinents à ce moment de la progression annuelle.

Afin de situer la séance de jeu de loto dans la séquence, il convient ici de mentionner les étapes principales qui l'ont précédée. J'ai donc assisté à la séance sur le nombre 10, ce qui m'a permis d'apprécier de quelle manière les nombres et leurs décompositions étaient étudiés en Grande Section. Celle-ci a eu lieu en situation frontale, avec le groupe au complet. Après avoir introduit le nombre 10 et son écriture, la maîtresse demande aux élèves, à partir de la constellation d'une carte à jouer, de trouver toutes les décompositions possibles du nombre 10. Les  élèves qui le désirent viennent au tableau dessiner des  groupements de points correspondant à une nouvelle décomposition du nombre 10. Puis la classe se sépare en ateliers. Plus ou moins guidés par la maîtresse, ils tentent –avec succès pour la plupart – de retrouver ces décompositions en étalant devant eux des bouchons de couleurs. Le jour suivant, les élèves feront, individuellement des exercices écrits de décompositions de nombres.

Le lendemain, le signe "+" est introduit, grâce à des schémas  à compléter du type:

 

 

 

 

 

 

 

 


Puis, toutes les décompositions du nombre 10 sont écrites collectivement au tableau sous forme d'additions: 1 + 9 , 2 + 8 , 3 + 7 etc…Des séances de manipulation ont lieu l'après-midi et les jours suivants, sous forme d'exercices individuels écrits variés, de difficultés croissantes: l'un des plus simples consiste à additionner des groupements de moutons dessinés (sans écriture chiffrée), d'autres à calculer le nombre total de points dessinés sur plusieurs dés, et d'autres encore à trouver la solution de véritables écritures additives. Pour tous ces exercices, les élèves ont à leur disposition  des bouchons de couleur , des abaques, des pots de crayons de couleur et sont fortement incités à s'en servir.

Il me semble donc, au début de la semaine suivante, que les élèves sont prêts à jouer au "loto des additions". En effet, les objectifs disciplinaires de cette séance sont:

§         réinvestir les connaissances acquises lors des séances précédentes

§         mettre en œuvre des stratégies de calcul rapide

§         additionner mentalement ou avec l'aide de l'écrit, de bouchons ou d'abaques des petits nombres dont le résultat n'excède pas 10

Cela va également dans le sens des objectifs de fin de Cycle 2 préconisés par les Instructions Officielles à savoir "[l'élève] aura été particulièrement exercé à la pratique du calcul mental (il connaîtra notamment les décompositions additives des nombres jusqu'à 20, et saura les utiliser pour effectuer mentalement des additions)"

Par ailleurs, le jeu de loto se déroulera de la manière suivante: les élèves seront par équipes de deux qui recevront chacune une grille de loto. Chaque grille comporte  4 écritures additives  et une représentation de deux dés dont il faut additionner les points. Je tirerai au sort une carte sur laquelle sera inscrit le résultat d'une ou plusieurs additions des grilles des participants. L'équipe qui reconnaîtra le résultat d'une addition inscrite sur sa grille et qui l'aura réclamée le plus rapidement se verra remettre la carte qu'elle pourra poser sur sa grille (les membres de l'équipe devront toutefois être capables de se justifier !). L'équipe qui aura entièrement rempli sa grille la première sera déclarée vainqueur.

Ainsi, les objectifs secondaires de cette séance sont d'ordre transversal et concernent plusieurs caractéristiques de la séance. Il s'agit en effet d'objectifs propres au jeu:

§         respecter et appliquer une règle du jeu

§         accepter le hasard (et donc le cas échéant, accepter de perdre)

§         être stimulé par la nécessité d'être rapide pour gagner

§       accepter la défaite face à des équipes plus performantes (c'est-à-dire ici plus rapides)

Mais aussi, du fait de la constitution d'équipes, d'objectifs propres au travail de groupe:

§         apprendre à chercher en équipe, c'est-à-dire à écouter et aider l'autre, mais aussi à s'affirmer au sein du groupe

§         pour les élèves en difficulté, essayer de comprendre et de s'approprier la procédure d'un autre élève.

2.2.  Séance 1 menée avec le premier groupe

 

- Déroulement

La séance a lieu dans la bibliothèque de l'école avec la moitié de la classe, soit huit élèves. Il faut préciser que la classe a été divisée en deux par l’institutrice, qui a volontairement composé des groupes homogènes. Les huit élèves de cette matinée étaient donc les plus avancés. J'ai disposé les tables avant l'arrivée des élèves et posé sur chacune d'elle de quoi manipuler à loisir (bouchons, abaques, crayons, feuilles de brouillon…). Les élèves, en arrivant, s'assoient sur les chaises installées pour eux et de ce fait se constituent eux-mêmes en équipes de deux.

Je leur annonce alors que nous allons faire un jeu, ce qui soulève immédiatement une vague d'enthousiasme. Je leur présente les grilles de loto et explique les règles: « Je vais donner à chaque équipe une grille comme celle –là. Mais d’abord, qui peut me dire ce qui est écrit dans cette case ? » (je leur montre une écriture additive) Une élève lit correctement « deux plus un ». J’enchaîne en disant qu’il s’agit effectivement d’additions, et je fais remarquer qu’il y a aussi des dés représentés. Je leur explique ensuite le déroulement du jeu : « Je vais tirer au hasard une petite carte sur laquelle sera inscrit un nombre. Ce nombre correspond à l’une des cases de vos grilles. Il va donc falloir chercher si le nombre est le résultat de l’une des additions qui est écrite sur votre grille de loto. Si c’est le cas, vous levez vite la main, et je vous donne la petite carte pour que vous la posiez sur votre grille. La première équipe qui aura rempli entièrement sa grille aura gagné ! Mais attention : plusieurs équipes peuvent avoir les mêmes cases, et c’est la plus rapide qui remportera la petite carte. Il faut donc calculer le plus vite possible ! » Je leur rappelle également qu’ils peuvent s’aider de tout ce qu’il y a sur la table. Puis je demande si un élève veut bien ré-expliquer, pour s’assurer que tout le monde a compris. Une élève reformule les règles correctement.

Je distribue les grilles de quatre couleurs différentes, ce qui me permet ensuite de  nommer les équipes par la couleur de leur grille. Je leur demande ensuite de prendre quelques minutes pour observer les additions. Puis le jeu commence. Je tire une carte: « attention, vous êtes prêts ? …le numéro 8 ! ». Tous les élèves regardent leur grille avec une grande motivation et un visible désir d’être rapides. Les premières équipes lèvent la main en m’appelant : « nous, on a le 8 ! ». Mais il s’avère, quand je leur demande de se justifier, que le nombre 8 est effectivement inscrit sur leur grille, en tant que membre de l’une des additions ! Je stoppe le jeu immédiatement pour ré-expliquer, non sans mal, en essayant d’employer leurs mots « il faut que le résultat d’une de vos cases fasse 8… Cherchez bien : qui "a une case qui fait 8" ? » Cette dernière expression, bien que peu académique, est mieux comprise. Une équipe seulement commencera à comprendre seulement en milieu de partie, après explication individuelle de ma part. Le jeu ensuite se déroule normalement, mais je constate que beaucoup ne trouvent pas les cases correspondantes, ou seulement quand je les y incite fortement avec des questions du type « les rouges, vous êtes sûrs d’avoir bien regardé votre grille ? Vous n’avez aucune case qui fait 5 ? ». Les cases les plus vite remplies restent celles comportant les additions de la forme n + 0. Les cases avec des dés sont tout simplement ignorées. Au bout de plusieurs tirages, une des équipes (les Bleus) semble avoir vraiment compris la démarche; il me semble que les autres équipes ont bien mieux compris à partir de ce moment. Je dois également les inciter à s’entraider au sein de l’équipe, car certains joueurs d’une même équipe semblent être en compétition l’un contre l’autre, chacun voulant trouver seul la réponse…Le jeu me semble trop long, près de 30 minutes s’étant déjà écoulées depuis le début de la séance. Une équipe décroche. Les autres restent pourtant très motivées, la fin du jeu et donc la désignation des vainqueurs approchant. Sur certaines grilles, il ne reste que deux cases, puis une. Une des équipes (toujours les Bleus) fait preuve de capacités anticipatoires : « Nous, il nous faut un 4 ». C’est cette même équipe qui gagne (bruyamment !). Nous terminons la partie, à la demande des enfants, afin qu’un deuxième, et un troisième soit désignés. Quelques railleries ont lieu à l’encontre de l’équipe perdante. Le groupe rentre joyeusement en classe, se précipitant vers la maîtresse pour lui dire qui avait gagné.

Modèle de grille distribuée au premier groupe

 

9 + 0

 

4 + 3

 

 

5 + 5

 

3 + 2

1 + 2

-  Analyse

 

J’ai ressenti très vite, au cours de la séance, que le niveau du jeu était trop élevé pour ces élèves. D’une part, contrairement à ce que je pensais, le concept d’addition était encore mal maîtrisé. Certains enfants ont cependant mieux compris de quoi il s’agissait quand j’ai utilisé le vocabulaire qu’il connaissait le mieux pour l’avoir toujours employé en classe, à savoir  « quelle est la case qui fait 5 ? » ou, pour les aider à prendre conscience d’une erreur : « 1 et 2, combien ça fait ? ». Mais d’autres, à cette question, répondaient « 12 », accolant les deux nombres au lieu de les additionner. En effet, non seulement le signe + venait tout juste d’être introduit, mais une confusion régnait  également dans la tête des élèves du fait que les nombres supérieurs à 10 étaient évoqués en classe  -pour la date, par exemple- sous la forme « 26, c’est un 2 et un 6 », ce qui aboutissait parfois à des formulations du type « 2 et 6 ça fait 26 ».

C’est un deuxième problème qui m’a confortée dans l’idée que cette séance avait peut-être lieu trop tôt : parmi ceux qui croyaient avoir trouvé la réponse en désignant un nombre membre de l’addition, il y avait des enfants qui avaient simplement mal compris la règle du jeu ; d’autres en revanche, ont longtemps persisté dans leur erreur : une explication probable est que ces enfants n’avaient pas encore assimilé le concept d’addition, ou ne savaient pas répondre. Entraînés par leur pairs et par un désir de répondre quand même, pour participer au jeu, ces élèves désignaient alors le nombre qu’ils venaient d’entendre. De plus je pense que la présence des additions du type n + 0 les a confortés dans leur stratégie, car celle-ci fonctionnait dans ce cas, le résultat de l’addition étant égal à l’un des ses membres.

Il est  également possible que certains aient été déstabilisés par le fait que c’est la décomposition d’un nombre sous forme d’addition qui leur était demandé. En effet, les élèves de cette classe avaient travaillé la décomposition plus souvent sous forme de schémas, de dessins ou de constellations que sous forme d’écritures additives. Peut-être maîtrisaient-ils mieux l’addition dans le sens ‘classique’, c'est-à-dire l’écriture additive dont il faut donner le résultat. J’avais pourtant prévu cette difficulté en proposant des faces de dés dans les grilles. Mais celles-ci étaient trop peu nombreuses (une seule par grille) à tel point que les élèves les ignoraient totalement ! Il a fallu que je fasse remarquer leur présence à plusieurs reprises.

Si l’addition était d’une manière générale assez mal maîtrisée par les élèves, ces difficultés auraient pu être amoindries si les nombres en jeu avaient été moins grands. En effet, parmi les élèves en réussite, beaucoup avaient des difficultés avec les écritures additives comprenant un nombre supérieur ou égal à 5,  et un écart entre les deux membres de l’opération supérieur ou égal à 2 .

Enfin, les élèves n’utilisaient pas spontanément les aides mises à leur disposition ; il est vrai que cela n’allait pas de pair avec l’obligation de rapidité donnée dans la consigne. J’ai dû les y inciter plusieurs fois en leur disant, paradoxalement de "prendre leur temps" ! En effet, ils étaient parfois en véritable situation de recherche, et rapidité aurait alors signifié précipitation… C’est également en observant les équipes manipuler le matériel que j’ai réalisé que beaucoup avaient du mal à s’associer véritablement, à chercher ensemble : certains se disputaient même le matériel pour pouvoir chercher tout seul. La notion d’entraide et de coopération est en fait difficile à cet âge, même si, en revanche, la victoire d’une équipe (« on a ga-gné ! ») a visiblement un sens pour eux !

Heureusement, il y avait tout de même des points positifs par rapport aux objectifs fixés. La réussite la plus évidente concerne directement les caractéristiques de l'apprentissage sous forme de jeu : tous les élèves, du moins pendant la première moitié du jeu (voir plus haut), étaient enthousiastes, désireux de répondre rapidement pour gagner la carte; l'effort de calcul était motivé par le plaisir du jeu,  le désir de gagner. La spécificité du jeu de loto permettait en outre, aux élèves les plus en difficulté de relancer régulièrement leur motivation; en effet, si une seule équipe remporte la victoire, tous les participants connaissent au cours de la séance au moins deux ou trois "petites victoires" en gagnant une carte pour leur grille, et c'est autant d'encouragements à continuer leurs efforts. Cette diminution des écarts de niveau entre élèves est également renforcée par le fait que le hasard entre en jeu dans le loto, et que les "plus forts" ne sont pas forcément les plus chanceux !

Sur le plan des apprentissages, il m'a semblé pour les élèves les plus avancés, que le jeu était profitable, qu'il leur permettait comme prévu dans les objectifs de la séance, de réinvestir les connaissances acquises en classe. Mais, paradoxalement, le point positif le plus important et le plus intéressant de la séance découle directement de mon erreur d'estimation du niveau des élèves : en effet il m'a semblé que certains élèves dont les connaissances sur la décomposition des nombres étaient en cours d'acquisition avaient progressé au cours du jeu, en entendant les autres raisonner, expliquer, justifier leur réponse. La réussite se situerait donc ici au niveau des objectifs souvent propres à l'oral, à savoir l'appropriation des procédures des autres.

Enfin, un dernier point concernant l'anticipation spontanée des élèves était une bonne surprise. En effet, l'une des équipes, de sa propre initiative, a mis en œuvre lorsque qu'il ne lui restait plus que quelques cases, une stratégie visant à être plus efficace et donc plus rapide : calculer à l'avance les additions pour n'avoir plus qu'à attendre que le bon résultat soit tiré. Là encore, il y a eu appropriation de cette procédure par une autre équipe.

Tous ces éléments et une discussion avec l'institutrice m'ont donc permis de modifier la séance que je devais mener le lendemain avec la deuxième moitié de la classe.

2.3. Séance 1 menée avec le deuxième groupe

 

J'ai, en premier lieu, modifié les grilles de loto. J'ai simplifié les additions (très petits nombres,  écarts entre les membres inférieurs à 2, ou doubles) et j'ai porté les cases contenant des constellations au nombre de trois soit la moitié des cases de la grille. Le nombre de points des faces de dés était cependant resté élevé. J'ai également modifier la forme de ma consigne, essayant de la rendre plus claire notamment en m'y attardant davantage.

 

 

-  déroulement

J'ai donc présenté le jeu à ce nouveau groupe –de huit élèves également-, en insistant cette fois sur la description de la grille: « Que voyez-vous sur cette grille ? Qu'est ce qu'il y a dans les cases ? Quelqu'un peut-il lire ce qui est écrit ? A part les additions, qu'y a-t-il dans les autres cases ? … » J'ai ensuite expliqué les règles du jeu et, toujours en situation frontale, j'ai tiré une première carte à titre d'exemple : en montrant simultanément une grille et la carte, j'ai demandé «Y-a-t-il sur cette grille une opération qui est égale à 4 ? » J'ai reçu plusieurs réponses, dont certaines désignaient le nombre 4 inscrit sur la grille ! J'ai donc expliqué le plus clairement possible, contrainte encore une fois d'utiliser l'expression " la case qui fait 4". Puis le jeu a commencé. Comme la veille, pendant la première partie du jeu, tous les élèves étaient enthousiastes et désireux de gagner, ne rechignant pas à l'effort. Mais la différence entre les équipes s'est avérée plus importante que dans l'autre groupe. Certains ont compris rapidement. Mais au bout d'un certain temps, une équipe, bien que semblant avoir compris, a décroché, et une autre à l'inverse, restait motivée bien qu'ayant du mal à suivre (malgré une aide ponctuelle de ma part). Enfin, ayant constaté la veille que l'équipe gagnante restait inactive pendant que les autres terminaient leur grille, j'ai demandé à ces deux élèves de me remplacer dans le tirage au sort, en leur recommandant de bien vérifier les affirmations des joueurs avant de leur remettre une carte.

Modèle de grille distribuée au second groupe

 

 

1 + 2

 

 

 

3 + 3

 

4 + 1

 

- Analyse

Le jeu simplifié était davantage adapté au niveau des élèves, même si ce groupe était moins avancé dans les apprentissages que le premier. En effet, pour ce qui est du sens de l'addition, la présence de trois cases avec des constellations sur six permettait à ceux qui ne l'avaient pas encore acquis de réussir malgré tout, et peut-être d'avoir une occasion de faire l'analogie entre la somme de points de deux dés et l'écriture additive. Pour les autres, les nombres moins élevés facilitaient considérablement le calcul et rendait le jeu plus attrayant, parce que plus vivant.

En revanche, la constitution différente de ce groupe m'a permis de pointer quelques problèmes qui auraient fort bien pu apparaître aussi la veille. Laisser les élèves constituer les équipes, par exemple, était une erreur. En effet, si elles étaient correctement constituées la veille par pur hasard, elles étaient ce jour là trop homogènes ; les deux élèves en difficulté auraient sans doute gagné à faire équipe avec quelqu'un de plus avancé qu'elles. L'équipe qui manquait de motivation aurait sans doute due être séparée également, ne serait-ce que pour une question de discipline. Enfin, cette dernière équipe m'a permis de soulever un problème d'ordre général et théorique, sur lequel nous reviendrons plus loin : que faire lorsque des élèves refusent de participer au jeu ?  Peut-on les obliger à jouer, comme on oblige à faire un travail ? Car "obliger à jouer", n'est-ce pas un non-sens ?

 

Alors que je pensais mener une séance d’entraînement par le jeu, le bilan de ces matinées avec l'institutrice m'a donc permis de mettre en évidence que cette séance avait eu lieu un peu trop tôt, une proportion importante des élèves de la classe étant encore en plein apprentissage de la décomposition des nombres et du sens de l'addition. Nous avons donc décidé de proposer à nouveau le jeu de loto trois semaines plus tard ; entre temps, les élèves poursuivraient leur apprentissage en effectuant toute sorte d'exercices et de manipulations en atelier.

2.4.  Séance 2, trois semaines plus tard

 

- Séance 2 menée avec le premier groupe

 

Après discussion avec l'institutrice au sujet de la progression des élèves pendant ces trois semaines, j'ai décidé de distribuer directement les grilles de la toute première séance, comportant des écritures additives avec des nombres assez élevés, et de ne pas mettre d'aide matérielle à leur disposition.

Les élèves se souvenaient des règles et les ont formulées avec succès. J'ai à nouveau précisé, par précaution, qu'il ne s'agissait pas de désigner un nombre inscrit sur la grille mais une addition dont le résultat était le nombre de la carte tirée au sort.

Le jeu a commencé… et je me suis immédiatement rendue compte des progrès considérables que les élèves avaient accomplis depuis la dernière séance. Certains comptaient sur leurs doigts, par comptage ou surcomptage, d'autres mentalement. Tous avaient compris le sens de l'addition. Le jeu était beaucoup plus vivant, rapide, dynamique. En trente minutes, les élèves  ont pu en faire deux parties !

En conséquence, les élèves ayant tous à peu près le même niveau de calcul, et les additions de la grille étant cette fois tout à fait à leur portée, le hasard a davantage compté que lors de la première séance ; finalement, on peut alors se demander si le jeu était  ce jour-là aussi profitable sur le plan  des apprentissages que trois semaines plus tôt . De même, si le plaisir de gagner était bien là, peut-être n'était-il pas tout à fait de même nature que celui que les enfants ressentaient lorsque la tâche était plus ardue… 

- Séance 2 menée avec le deuxième groupe

 

Le second groupe avait également  bien progressé. J'avais pris soin cette fois de séparer les élèves trop en difficulté, ou ayant un peu trop d'affinité entre eux. Je leur ai distribué la grille la plus difficile à eux aussi. Mais elle l'était encore un peu trop, sauf pour l'une des équipes. Nous avons terminé la partie dès qu'un gagnant avait été désigné, et sans attendre, je leur ai proposé de refaire une partie, mais avec "des grilles plus faciles" cette fois. J'ai donc distribué les nouvelles grilles, sauf pour l'équipe gagnante, à qui j'ai donné une autre grille "difficile". Le jeu, cette fois a bien fonctionné.

Le point positif de cette séance  concerne  une élève qui désignait encore au début de la partie les nombres inscrits sur la grille. Sa co-équipière, qui elle avait compris la démarche, a entrepris au cours du jeu de la lui expliquer. L'élève, au bout d'un moment de réflexion et d'observation, a donné une ou deux  bonnes réponses. A mon grand plaisir, l'objectif de la constitution hétérogène d'équipes (qui est de favoriser la coopération, l'échange entre élèves et éventuellement l'appropriation de la procédure d'autrui) était approché.

 

2.5. Evaluation et bilan

 

J'ai distribué aux élèves, quelques jours plus tard, un exercice d'évaluation, car même si un jeu se déroule en effectif restreint et donc propice à l'évaluation par l'observation, il reste bon pour les élèves de produire une trace de l'activité. Cela leur permet de mieux fixer leurs connaissances, de conserver une trace du jeu, mais aussi de revenir de façon individuelle sur l'activité, sans obligation d'être rapide, sans pression de la part des autres, et cela leur permet également de chercher entièrement seul, sans la possibilité de se reposer sur son co-équipier. En somme, cela revient à tester les compétences que l'élève devait mettre en œuvre pendant le jeu, mais justement sans l'habillage du jeu qui, comme nous allons le voir, peut parfois et pour certains élèves être une entrave. Cet exercice individuel consistait donc à découper puis à coller des cartes-résultats, sur les cases d’une grille de loto semblable à celles avec lesquelles les élèves avaient joué collectivement. Cela m'a donc permis d'évaluer de manière plus sûre les compétences des élèves, mais également de renseigner l'institutrice qui n'était pas présente lors des séances. Onze élèves sur seize ont réalisé l’exercice sans aide et sans erreur.

Enfin, le jeu a été mis à leur disposition dans la classe, afin qu’ils puissent s’y exercer à loisir, seuls ou à plusieurs, pendant les semaines suivantes.

 

III. Les limites du jeu

 

3.1.  Les difficultés liées à sa mise en place

 

L'importance de la préparation et de la conduite des jeux proposés en classe est apparue clairement à travers l'analyse des séances décrites précédemment. Ainsi il peut apparaître divers problèmes liés à:

-          la gestion du groupe et des équipes :  il faut tout d'abord signaler que l'expérience a été menée à chaque fois avec un groupe de huit élèves seulement, dans la BCD, tandis que les autres étaient en classe avec leur institutrice. En effet, gérer un groupe de vingt-cinq élèves  aurait certainement été plus problématique. Concernant la constitution des équipes, nous avons vu que laisser faire le "hasard" pouvait faire apparaître un phénomène de leader, ou créer des équipes trop homogènes, ce qui n'est pas profitable aux élèves en difficulté. Enfin, du fait même de cette configuration analogue, finalement, à celle du travail de groupe, et compte tenu de l’ambiance de jeu, toujours un peu agitée, qui règne nécessairement dans la classe, comment s'assurer que tous les élèves participent effectivement ?

-          la gestion du temps : d’une part, évaluer la durée d’une séance de jeu me paraît assez difficile, dans la mesure où, généralement, le hasard intervient ; d’autre part concernant la séance que j’ai menée, la mauvaise estimation des capacités des élèves a engendré une erreur d’évaluation de durée également : le premier jeu de loto a duré environ 45 minutes quand je pensais qu’il serait terminé en moins d’une demi-heure, et à l’inverse, lors de la deuxième séance trois semaines plus tard, le même jeu avec les mêmes élèves était achevé en 15 petites minutes.

Cela nous amène à évoquer une dernière difficulté, même si elle n’est bien sûr pas propre au jeu : comme toutes les séances, le jeu doit être intégré au bon moment dans la séquence d’apprentissage. En effet, s’il est introduit trop tôt, le risque est de mettre les élèves en situation de recherche, alors que cela n’était pas l’objectif du maître (signalons cependant que cela peut être voulu ); si au contraire le jeu est trop simple l’attention des élèves peut se relâcher, et l’apprentissage ne sera de toutes façons pas très profitable.  En définitive, dans ces deux cas, la séance perd le bénéfice des spécificités du jeu pour lequel elle avait justement été mise en place.

 

3.2. Remédiations  possibles

 

La plupart des difficultés évoquées sont bien entendu le résultat de mon inexpérience. En effet, gérer sa propre classe, éventuellement en faisant travailler un groupe en autonomie, cela s’apprend, et dépend de beaucoup de facteurs (nombre et âge des élèves, moment de la journée, de l'année, locaux disponibles…). De même, lorsque le maître constitue des équipes, il ne le fait pas au hasard, car il connaît ses élèves. Pour cette raison, il sait qui il doit observer plus particulièrement pour savoir s’il participe ou non.  De la même manière, c’est l’expérience et la connaissance du niveau de ses élèves qui permettent au maître d’insérer le jeu correctement dans la progression des apprentissages.

Toutefois, face à ces difficultés générales liées à la mise en place du jeu, quelques remédiations effectives peuvent être envisagées : une évaluation individuelle, peut permettre de mieux cerner les capacités de l’enfant. Celle-ci peut être un exercice écrit reprenant le principe du jeu ( ce que j'ai choisi pour mes séances ),  mais elle peut aussi être une observation de la part du maître lorsque les élèves jouent au même jeu, mais en atelier, à deux ou même seuls. D’une manière générale, cela permet aux élèves les plus en difficulté de rejouer en prenant leur temps, et en jouant pleinement leur rôle de participant.

3.3. Les limites inhérentes au jeu

 

Cependant, la pédagogie du jeu possède en elle-même des limites. En effet, ce qui fait la richesse de l’apprentissage par le jeu pour la plupart des élèves peut être une entrave pour d’autres. La pression du groupe, des co-équipiers, l’obligation de rapidité peuvent être autant de facteurs inhibants pour les élèves plus lents, plus réservés que le reste du groupe.  Ceux-là préfèreront sans doute les jeux à deux, ou individuels . De même que la même méthode pédagogique ne convient pas de la même façon à tous les élèves, le même jeu ne peut convenir à tous. Ainsi, il faut faire varier les types de jeux, de même qu’il est absolument nécessaire de varier les situations d’apprentissage, les supports, les approches…

Un deuxième problème existe quant au sens même de la notion de jeu : comment le présenter aux enfants ? Seulement comme un jeu, en les laissant découvrir que dans ce jeu se "cachent" des apprentissages ? Ou d'emblée comme un travail sur une notion, mais qui prend la forme d'un jeu ? La première solution semble revêtir des allures de tromperie vis-à-vis de l'enfant, à qui l'on annonce comme une récréation qui n'en est pas une. Mais la seconde risque de diminuer l'efficacité de l'apprentissage par le jeu sur le plan de la motivation. L'annonce de ce type de séance se révèle en effet délicate : elle dépend de la notion travaillée, de l'âge des enfants, du type de jeu. Tout le problème est donc de sauvegarder l'efficacité du jeu en ce qu'elle a de spécifique, tout en veillant à ce que les enfants soient conscients qu'il s'agit d'un jeu à but pédagogique.

Enfin, cela nous amène à soulever la dernière difficulté propre au jeu, que nous avons déjà évoquée au cours de l'analyse des séances : le jeu scolaire, n'est-ce pas un paradoxe ? Dans son acception ordinaire, le jeu est synonyme de divertissement, de gratuité, de liberté. Or, en l'utilisant comme outil pédagogique, il peut parfois s'éloigner considérablement des divertissements habituels de l'enfant que l'on fait jouer. De même, le jeu en classe n'est bien sûr jamais gratuit, puisque c'est toujours un objectif d'apprentissage précis qui fait sa raison d'être. Enfin, l'élève n'est jamais libre d'entrer ou non dans le jeu : il y est contraint par la pratique de classe ; même s'il s'agit d'un jeu, on imagine mal un maître accepter de ses élèves un refus de jouer ! Mais imagine-t-on mieux un enseignant qui "oblige" à jouer ?  Face à un tel paradoxe, on ne peut qu'essayer de redéfinir la séance d'apprentissage par le jeu: une intégration, à la situation d'apprentissage, des quelques spécificités du jeu qui  la rendront plus efficace.


 

Conclusion

 

 

Mes expériences dans cette classe de Grande Section m'ont permis de mieux cerner le rôle qu'on pouvait accorder au jeu à l'école, et notamment dans l'apprentissage des mathématiques au début du Cycle 2.

On peut donc dire que le jeu est, d'une manière générale, une activité nécessaire au développement de l'enfant, mais qu'il est aussi, à l'école, une manière originale et efficace d'aborder ou de réinvestir certaines connaissances. En effet, le principe premier du jeu est la recherche du plaisir tout en se pliant à certaines règles qui lui sont propres. C'est en ce sens qu'il est un outil pédagogique efficace: les élèves sont motivés par le plaisir de jouer, le désir de gagner, de se surpasser et l'effort d'apprentissage est davantage désiré. En outre, la situation de jeu possède des vertus sur le plan de l'apprentissage de la vie en société et répond en ce sens à l'un des grands objectifs du début de Cycle 2: la socialisation. Enfin, le jeu constitue une situation d'apprentissage hors norme par son caractère dépénalisant.

Toutefois une grande attention doit être accordée à la mise en place des situations de jeu en classe. Celles-ci doivent intervenir au bon moment dans la progression avec des variables didactiques adaptées, la gestion du groupe classe doit être maîtrisée.

Enfin, si le jeu bien conçu est incontestablement un bon outil pédagogique, il ne doit pas être répété trop souvent, au risque de perdre cette efficacité: trop de jeux éducatifs peuvent tuer le goût du jeu.


Bibliographie

 

- Le jeu de l'enfant après trois ans, sa nature, sa discipline: Introduction à la pédagogie.

Jean CHATEAU. Collection Etudes de psychologie et de philosophie ; Vrin1967.

 

- Le réel et l'imaginaire dans le jeu de l'enfant: essai sur la genèse de l'imagination.           

 Jean CHATEAU. Collection Etudes de psychologie et de philosophie; Librairie philosophique, 1967

-  Le jeu pour le jeu.   Joseph LEIF, Lucien BRUNELLE ; Bourrelier Education ; Librairie Armand Colin, 1976

 

- Journal Des Instituteurs  n° 7   Mars 1999  Nathan

 

- Programmes de l’école primaire, Ministère de l’Education Nationale, CNDP, 1995


Julie LOCKERT-DELPUECH

 

Fiche descriptive :

Efficacité et limites du jeu comme outil pédagogique.

Un exemple : les mathématiques en cycle 2.

 

 

Le "jeu à l'école": l'expression semble paradoxale, car l'institution scolaire n'est généralement pas associée à la notion de plaisir liée au jeu. Pourtant, il suffit de l'avoir observer une fois pour se rendre à l'évidence : il s'agit d'un outil particulièrement riche sur le plan pédagogique. Ceci, c'est ce que nous tenterons de montrer dans une première partie théorique à travers diverses entrées.

De manière générale, comme l'indique Jean CHATEAU dans Le jeu de l'enfant, le jeu joue un rôle prépondérant dans le développement de l'enfant. Il peut également être un mode d'intégration, en ce sens où il est une forme d'introduction à d'autres réussites. De plus, tout jeu étant soumis à des règles, les enfants doivent apprendre à les respecter, ceci pouvant être une forme d'éducation à la citoyenneté.

Sur le plan pédagogique, le jeu permet une approche différente de certains objectifs, il fournit des situations d'apprentissage variées. Il peut être une manière d'apporter du sens à l'apprentissage de certaines notions dont l'intérêt n'est pas toujours évident pour de jeunes élèves. Le sens ainsi créé permet de motiver les enfants et peut les aider à mieux comprendre ou retenir. L'aspect ludique d'une séance peut, en outre, être un facteur libérateur pour certains élèves qui font des blocages face à des activités trop "scolaires". Enfin, la compétition  au sein d'un jeu représente une motivation supplémentaire non négligeable.

La deuxième partie du dossier concerne mes observations et interventions dans une classe de début de Cycle 2. Il s'agit d'une séquence d'introduction à l'addition en Grande Section, incluant des séances de jeu de "loto des additions". Mener ces séances m'a permis de constater l'importance de la préparation du jeu concernant la gestion du groupe, du temps, et des diverses variables didactiques. Le rôle du maître est également très important, puisqu'il anime le jeu toujours en référence à un objectif d'apprentissage.

Enfin , dans la dernière partie, nous verrons que, en plus des problèmes de mise en place soulevés de manière évidente dans l'analyse des séances que j'ai menées, il existe des difficultés générales, liées à la nature même du jeu: il peut poser des problèmes à certains enfants, ou dans certaines situations. Ainsi, il ne faut pas oublier que le jeu est un outil pédagogique parmi d'autres, et qu'il faut savoir l'utiliser à bon escient.