Révolution, Empire et XIX° siècle : des droits
de l'homme au citoyen de la Ill° République

 

Problématique : En 10 ans, la Révolution met à bas 17 siècles de monarchie. Non seulement le royaume a perdu son roi, guillotiné, mais il a perdu tous les principes et tous les privilèges sur lesquels il était fondé. A sa place, la République inaugure l’ère des droits de l'homme et du citoyen, bâtie sur le juste pouvoir des représentants de la Nation. Comment alors ces valeurs universelles d'égalité, de liberté ont-elles débouché sur la dictature de Napoléon ? Comment ces valeurs démocratiques ont-elles pu fonder à la fois la Ière, la IIème et la IIIème Républiques, et s'accommoder des terribles inégalités et oppressions de la nouvelle société industrielle du XIX° siècle ?

I) La Révolution et l'Empire : l'avènement d'une France nouvelle

A) La destruction de l'Ancien Régime : de la monarchie constitutionnelle à la République (1789-1792)

1) 1789: l'invention des droits de l'homme et du citoyen

Très vite, les États généraux ouverts à Versailles le 5 mai 1789 échappent à l'intention première du roi et de ses ministres : imaginer de nouvelles ressources financière pour la monarchie. Le 17 juin 1789, les députés bourgeois du tiers-état, "considérant qu'ils représentent 96% de la nation", se proclament Assemblée nationale. Louis XVI tente de disperser l'Assemblée par la force, ce qui suscite le Serment du Jeu de Paume de donner une Constitution au royaume, avant de céder et d'ordonner aux députés du clergé et de la noblesse de se fondre dans l'Assemblée nationale. Le 9 juillet, celle-ci se proclame Assemblée constituante. C'est le premier acte - politique - de la Révolution : au nom de leur représentativité, les députés du tiers ont affirmé l'existence politique de la nation, le droit de dire la loi. C'est la fin de la monarchie absolue.

A cette révolution politique succède rapidement une révolte populaire. D'abord à Paris où le peuple et les "patriotes" bourgeois, alarmés par une possible contre-offensive des troupes royales, s'insurgent et mettent sur pied une nouvelle municipalité et une milice bourgeoise, la garde nationale. Ensemble, ils partent à l'assaut de la prison royale de la Bastille, symbole de la monarchie absolue, le 14 juillet. Louis XVI cède à nouveau, et lors d'une visite à Paris, reconnaît la nouvelle autorité municipale et accepte la cocarde tricolore qui unit le blanc, couleur du roi, au rouge et au bleu de la ville de Paris.

Dans les provinces, d'autres municipalités, dotées de leur garde nationale, ont succédé à l'administration royale. Surtout, en juillet, la Grande Peur s'empare des campagnes. Alarmés par des rumeurs de brigandage, de destruction de leur récolte, les paysans s'en prennent au château voisin pour y brûler les terriers, les registres recensant les droits seigneuriaux. Pour tenter de couper court aux désordres, les députés, à l'initiative d'une noblesse effrayée, décident dans la nuit du 4 août l'abolition des privilèges. Certes, seule la servitude personnelle est immédiatement supprimée, les autres droits seigneuriaux devant être rachetés par les paysans, mais c'est la fin de la division de la société en trois ordres qui est proclamée. Une véritable révolution sociale vient de succéder à la révolution politique. D'autant plus que l'assise financière du premier ordre du royaume est ébranlée, avec la nationalisation, autrement dit la confiscation en novembre 1789 des biens fonciers et immobiliers du clergé.

En ayant fini avec ce que les révolutionnaires appellent l'Ancien Régime, les députés s'attellent à définir les principes de la société nouvelle, contenus dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. Les Français ne sont donc plus des sujets, mais des citoyens. Ils bénéficient de l'égalité des droits (abolition des privilèges), de la liberté, d'aller et de venir, d'exprimer son opinion, de pratiquer ou non une religion (le protestantisme est reconnu), de posséder (y compris des esclaves, dans les colonies, malgré les efforts abolitionnistes de Robespierre et de la Société des Amis des Noirs). Tous ces principes sont garantis par la Loi, qui émane nécessairement de la nation souveraine (et non plus du roi ou de Dieu).

Tous ces principes animent non seulement l'Assemblée, où apparaissent des tendances de " gauche " et de " droite " (par rapport au pupitre du président), où le public est présent. Mais les Français inventent aussi à cette époque la politique, avec leurs débats autour des affiches, des journaux qui se multiplient (L'Ami du peuple de Marat), des clubs politiques qui prolifèrent (les Cordeliers, où figurent les premiers républicains, les Jacobins où intervient Robespierre). Les Parisiens restent des acteurs de premier plan, les Parisiennes aussi, lorsqu'ils ramènent au château des Tuileries à Paris Louis XVI et sa famille, lors d'une expédition armée à Versailles les 5 et 6 octobre, pour tenir sous leur surveillance un roi qui refuse d'approuver la décision du 4 août.

2) 1792 : la lère République (22 septembre)

Le double-jeu de Louis XVI, une situation militaire difficile, le conflit entre une Assemblée bourgeoise et un pouvoir parisien populaire expliquent la chute de la monarchie.

D'abord, le roi refuse en bloc la Révolution. C'est ce qu'il écrit avant de tenter de fuir à l'étranger en juin 1791 (il est reconnu et arrêté à Varennes). Préservé par la majorité modérée de l'Assemblée, le roi empêche par la suite le fonctionnement de la monarchie constitutionnelle, dont les institutions sont fixées par la Constitution de 1791. Conformément aux idées de Montesquieu, les pouvoirs sont séparés, l'exécutif revenant au roi, le législatif appartenant à l'Assemblée, une Assemblée législative élue en septembre 1791 au suffrage censitaire (cette Constitution écarte du vote 3 000 000 de " citoyens passifs " - majoritaires dans les villes -, trop pauvres pour payer le cens exigible, équivalent à 3 journées de travail).

Cette trahison du roi ruine la crédibilité qui lui restait et renforce le sentiment républicain, tout en accentuant les divisions entre l'Assemblée et la rue. La garde nationale réprime ainsi dans le sang une manifestation républicaine exigeant la destitution du roi au lendemain de Varennes.

L'entrée en guerre accentue encore les tensions. C'est avec l'arrière-pensée d'une défaite de la France révolutionnaire que Louis XVI approuve, le 20 avril 1792, la guerre contre l'Autriche, décidée par les modérés et les Girondins de l'Assemblée (" Les immigrés persistent dans leur rébellion, les souverains étrangers persistent à les soutenir. Peut-on balancer à les attaquer ? " Discours aux Jacobins de Brissot, l’un des leaders girondins). Les combats s'engagent mal. Quand les Parisiens reçoivent du duc de Brunswick, commandant des armées prussiennes et autrichiennes, l'ordre de se soumettre à Louis XVI, ils mettent en place une Commune insurrectionnelle et le 10 août, donnent l'assaut au château des Tuileries. Louis XVI doit se réfugier à l'Assemblée, qui le suspend et le fait emprisonner à la prison du Temple, avec toute sa famille. C'est la fin de la monarchie.

Une Convention, élue en principe au suffrage universel - fondant ainsi le premier régime démocratique de notre histoire (en réalité, seule une minorité de 'patriotes' s'est exprimée), proclame alors le 22 septembre 1792 premier jour de l'An 1 de la République. Cette République voit alors s'opposer ses représentants bourgeois élus, la majorité girondine, et "sans-culottes", ouvriers et artisans parisiens partisans d'une démocratie directe. Appuyés sur les sans-culottes, les Montagnards dirigés par Robespierre obtiennent d'abord la condamnation et l'exécution du roi, le 21 janvier 1793, puis l'arrestation des Girondins, en juin 1793.

Partisans d'une démocratie sociale, du droit à l'assistance pour les nécessiteux et d'une instruction publique pour tous, les Montagnards imposent surtout la dictature d'un Gouvernement révolutionnaire, sous la forme d'un Comité de sûreté général et d'un Comité de Salut public, pour faire face aux ennemis de l'intérieur (" l'armée catholique et royale " des paysans vendéens hostiles à la conscription militaire, l'insurrection de plusieurs villes et régions " fédéralistes " girondines) et de l'extérieur (une coalition des armées européennes animée par l’Angleterre). Cette mobilisation est efficace, tout comme la Terreur décrétée en juillet 1793 est sanglante : la reine Marie-Antoinette, les Girondins, puis les dantonistes, des prêtres, en tout des milliers de personnes sont exécutées. La répression contre les Vendéens est terrible, les armées ennemies sont repoussées par les soldats de l'An II, notamment à Fleurus en juin 1794. Le pouvoir révolutionnaire est sauvegardé, mais Robespierre continue d'exiger un soutien sans faille à son entreprise de fondation d'un ordre et d'un homme nouveaux, forgés dans la vertu et le droit au bonheur et dans le culte de l'Etre suprême.

Las de la Terreur et du pouvoir personnel de Robespierre, un complot de conventionnels renverse Robespierre le 9 Thermidor an II (27 juillet 1794). Il est exécuté avec ses derniers fidèles le lendemain.

Cette République thermidorienne est fermement républicaine, mais entend se préserver des excès révolutionnaires. Une nouvelle Constitution, en 1795, met en place le Directoire, fondé sur un suffrage censitaire, où le pouvoir est abandonné aux propriétaires. C'est un régime faible, discrédité par le luxe et la corruption des dirigeants face à la misère du peuple, menacé à droite par les royalistes et les Chouans (qui poursuivent le combat des Vendéens) et à gauche par les Jacobins, le peuple parisien et les premiers communistes emmenés par Gracchus Babeuf. C'est sans trop de mal que le jeune Bonaparte, qui s'est couvert de gloire lors de ses campagnes en Italie et en Égypte, renverse le régime lors du coup d'État du 18 brumaire 1799.

B) " La Révolution est finie " (Bonaparte) (1799-1815)

1) Bonaparte met fin à la Révolution

Après 10 ans de Révolution et de guerre, de Terreur et de difficultés économiques, la population est prête à se soumettre au pouvoir personnel de Bonaparte, pourvu qu'il assure le retour à l'ordre et préserve les conquêtes révolutionnaires. En effet, la Constitution de décembre 1799 confie tout le pouvoir exécutif, et une part importante du pouvoir législatif, à Bonaparte, Premier consul, qui peut s'exclamer : " Citoyens, la Révolution est fixée aux principes qui l'ont commencée, elle est finie ".

Dès lors, Bonaparte essaie de réconcilier les différentes forces qui s'opposent depuis 10 ans pour assurer les fondements de son pouvoir : il recrute comme préfets placés à la tête de chaque département, d'anciens Montagnards et d'anciens royalistes. Il autorise les émigrés - nobles, bourgeois, dont certains avaient fui la France dès le 14 juillet 1789 - à rentrer au pays. Mais il garantit aussi les transferts de propriété qui ont eu lieu, avec le rachat, par la bourgeoisie et les plus aisés des paysans, des biens nationaux, les propriétés du clergé et des émigrés confisquées. De plus, il réhabilite le catholicisme, garant de l'ordre social, en signant en 1801 un Concordat avec le pape. Pour pérenniser son pouvoir, Bonaparte se fait d'abord désigner consul à vie par plébiscite en 1802, puis imagine de fonder la " quatrième dynastie " en proclamant l'Empire.

2) Un Empire éphémère, une œuvre durable

C'est par un nouveau plébiscite - dévoiement démagogique du suffrage universel - que Bonaparte se fait proclamer Empereur héréditaire des Français, sous le nom de Napoléon ler. Son sacre donne lieu à une cérémonie fastueuse le 2 décembre 1804 à Notre-Dame de Paris (voir le célèbre tableau de David). La République a vécu, Napoléon a rétabli la monarchie en France.

Cette monarchie s'appuie sur le clan familial, dont plusieurs membres dirigent les royaumes conquis par l'empereur (Espagne, Sardaigne, Grand Duché de Varsovie...), sur une vie de cour, aux Tuileries, à Fontainebleau, où il s'entoure de l'ancienne et de la nouvelle noblesses (ses maréchaux, issus pour la plupart de la moyenne bourgeoisie deviennent altesses sérénissimes), sur une propagande servie par le Catéchisme impérial (" Dieu a établi Napoléon notre souverain… Honorer et servir notre empereur est donc honorer et servir Dieu lui-même "), enfin sur un despotisme de plus en plus manifeste, dans la censure de la presse, de l'imprimerie et des théâtres, dans la surveillance policière de l'opinion, et notamment des ouvriers.

L'Empire, en se construisant sur les victoires d'Austerlitz (1805, contre l'Autriche), d'Iéna (1806, contre la Prusse), flatte le patriotisme des Français, tout en permettant l'ascension sociale de soldats et de leurs chefs et en drainant vers la France les richesses et les impôts soutirés aux peuples vaincus. En 1810, grâce à la supériorité en nombre des armées françaises, qui intègrent de plus en plus de recrues étrangères, et au génie militaire de Napoléon, l'Empire domine toute l'Europe, avec ses 130 départements qui intègrent la Belgique, la Hollande, la Rhénanie, la côte dalmate (les provinces illyriennes), en s'étendant de Hambourg jusqu'à Rome.

L'orgueil conquérant de Napoléon, sa volonté de briser l'hostilité anglaise en imposant un blocus continental contre Londres vont se briser lors la lamentable campagne de Russie, fatale à la Grande Armée dans l'hiver 1812. La retraite de Russie est le prélude de la contre-offensive européenne qui aboutit à la première abdication d'avril 1814, et à la première Restauration du frère cadet de Louis XVI, Louis XVIII. Les maladresses des royalistes donnent une dernière chance à Napoléon, qui reprend le pouvoir pendant les Cent Jours, avant d'être définitivement abattu à Waterloo, le 18 juin 1815.

Dès lors s'élaborent les deux versants du mythe napoléonien, la légende dorée du général victorieux, du glorieux soldat de la Révolution, la légende noire de l'ogre dévoreur de chair fraîche. Mais Napoléon disparu, l'essentiel de son œuvre de réorganisation administrative et de centralisation politique perdure, soutenue par la classe de notables qu'il a renforcée.

Ces notables, issus de la bourgeoisie et des possédants, Napoléon se les rallie en leur offrant des carrières au sein de l'administration et de l'armée. Le nombre de fonctionnaires, formés dans les lycées fondés dès 1802, augmente et assure l'encadrement de la population, au niveau de tous les départements. Si le Code civil de 1804 confirme les principes de 1789 (liberté et égalité devant la loi), il consacre l'inégalité sociale en reconnaissant pleinement le droit de propriété, en favorisant le patron par rapport au salarié, l'époux et le père par rapport à la femme et aux enfants. Les plus dociles des serviteurs de l'Etat, quels que soient leur rang et leur condition d'origine, sont récompensés par la Légion d'honneur et l'entrée dans la nouvelle noblesse.

C) Une France bouleversée, une France modernisée (1789-1815)

1) Une société profondément transformée

Après un quart de siècle de Révolution et d'Empire, les structures du pays ont été complètement transformées. Certes, en 1815, avec la Restauration des Bourbons (Louis XVIII, puis Charles X), la France est redevenue une monarchie. Mais le pays a osé la République, guillotiné Louis XVI, expérimenté le suffrage universel, inventé la nation souveraine et le régime d'assemblée, la démocratie représentative.

La monarchie de 1815 n'a rien à voir avec celle de l'Ancien Régime jeté à bas : la société d'ordres a disparu, les privilèges ont été abolis (les droits féodaux ont été totalement abolis en 1793) et le clergé réfractaire, les nobles, les émigrés rentrés avec Louis XVIII ne peuvent récupérer leurs terres confisquées et vendues. Un immense transfert de propriété a eu lieu au bénéfice de la bourgeoisie et des plus aisés des paysans. Cette bourgeoisie a renforcé ses positions au cœur de l'État en décrochant postes militaires et administratifs. Au niveau économique, la loi Le Chapelier, dès 1791, a brisé toute possibilité de compagnonnage et de grève pour les ouvriers, soumis au livret ouvrier par Bonaparte.

Entrés massivement en politique, les Français se sont reconnus acteurs de l'histoire, à Paris, dans les campagnes, mais aussi en parcourant les routes d'Europe dans les campagnes militaires du Directoire (qui impose la conscription en 1798) et au sein de la Grande Armée. Un sentiment national s'est forgé dans la revendication d'une société meilleure, plus égalitaire, mais aussi dans la guerre et dans la progression du français, langue de la Nation que les révolutionnaires tentent d'imposer contre les dialectes et les patois (cf. texte p.252).

2) Un cadre territorial et administratif unifié

Une langue unique pour une Nation unifiée : la Révolution déclenche, surtout avec les Jacobins et les Montagnards, une volonté de centralisation politique et administrative que Bonaparte porte à son comble. Tout le territoire est découpé, en 1790, en départements, subdivisés à leur tour en arrondissements, cantons et communes, circonscriptions de base de toute la vie politique, fiscale, religieuse du pays. Trois impôts nouveaux voient le jour : foncier, mobilier, et pour les commerçants, la patente. En 1791, le système métrique unifie les unités de mesure et de poids, tandis que l'état civil est confié aux autorités municipales laïques. Bonaparte contrôle d'une main lourde ces nouveaux instruments de pouvoir, par le biais d'une administration étoffée et des préfets (cf. texte p. 264). Pour la première fois, le territoire français est véritablement unifié, avec la disparition de tous les péages et douanes intérieurs.

3) Des symboles pour une histoire nouvelle

Ce quart de siècle d'histoire lègue un héritage symbolique extrêmement riche, capable de nourrir les combats politiques tout au long du XIX° siècle. Ainsi de la cocarde et du drapeau tricolores, symboles par excellence de la Révolution, armes décisives pour les républicains affrontés aux monarchistes, ou pour les orléanistes affrontés aux légitimistes. De la même façon, la Marseillaise, de chant guerrier pour l'armée du Rhin, est devenue un hymne révolutionnaire et patriotique. Influencés par les philosophes, les révolutionnaires rêvent d'une éducation pour tous destinée à enraciner en l'homme nouveau l'amour de la patrie et la haine du tyran. Tous ces principes seront au fondement de la III° République, à partir de 1875...

Symbolique aussi de cette conscience partagée par tous qu'une ère nouvelle a succédé à l'Ancien Régime, l'adoption d'un calendrier révolutionnaire (cf. pp 250 à 252) et l'accélération d'une déchristianisation entamée dès la fin du XVIII° siècle.

Enfin, la période lègue le thème, vigoureux jusque dans le cœur du XX° siècle (Pétain, De Gaulle...), du sauveur plébiscité par le peuple démuni. Dès lors, deux pôles de la vie politique française à l'époque contemporaine sont fixés : d'un côté, la quête d'un régime démocratique ; de l'autre, l'abandon aux mains de l'homme providentiel.

II) Le XIX° siècle, siècle des Révolutions

A) Révolutions politiques : les difficiles progrès de la démocratie

1) Du libéralisme politique…

La Restauration inaugure un régime de monarchie constitutionnelle d'un tiers de siècle, de 1815 à 1848. Le roi, rétabli, n'est pas un souverain absolu, puisque ses pouvoirs sont définis par un texte écrit qui les encadre : la Constitution. Pendant la Restauration (1815-1830), ces pouvoirs, exercés par les deux derniers Bourbons, Louis XVIII et Charles X, sont néanmoins considérables: refusant toute souveraineté du peuple, ils s'arrogent tout le pouvoir exécutif et s'attribuent l'initiative des lois. Pour en discuter, deux assemblées sont élues au suffrage censitaire très restreint. La politique très conservatrice de Charles X, sa volonté de contrôler la presse provoquent les " Trois Glorieuses ", les trois journées révolutionnaires de juillet 1830.

La Révolution de 1830, qui voit l'apparition des barricades dans les quartiers populaires de l'est parisien, porte au pouvoir un cousin du roi, le duc d'Orléans, sous le nom de Louis-Philippe ler. La Monarchie de juillet (1830-1848) consacre les conquêtes libérales de 1789 : la souveraineté nationale est rétablie, avec deux assemblées disposant du pouvoir législatif et élues au suffrage universel restreint. Le drapeau tricolore des orléanistes succède au drapeau blanc des légitimistes. Louis-Philippe, " le roi-citoyen ", s'appuie sur une bourgeoisie qui triomphe politiquement de l'aristocratie et du clergé (comme le banquier Casimir Périer ou l'historien Guizot) et sur la garde nationale, une milice bourgeoise qui réprime durement troubles sociaux et émeutes ouvrières (révolte des canuts de Lyon en 1831). La condition ouvrière est terrible : en 1841, la première loi sociale interdit le travail des enfants de moins de 8 ans, la journée de travail étant limitée à 8 heures jusqu'à 12 ans, à 12 heures jusqu'à 16...

La Révolution de 1848 marque les limites du libéralisme politique et les aspirations à la démocratie. Certes, la monarchie constitutionnelle, sous Louis-Philippe notamment, a montré l'importance des débats parlementaires, l'habitude prise par les Assemblées de contrôler le gouvernement et notamment son budget et ses finances, mais cette vie politique intense ne concerne qu'une toute petite minorité. Certes, le libéralisme s'oppose au despotisme, mais il est alors essentiellement l'idéologie de la grande bourgeoisie : Guizot développe l'instruction primaire, en 1833 (cf texte p. 275), mais il rétorque aux partisans de l'élargissement du cens " Enrichissez-vous par le travail et par l'épargne et vous deviendrez électeurs... "

2) ...à la démocratie

Ce sont les républicains, tout imprégnés de la Révolution de 1789 et 17912, qui font entrer la France dans l'âge de la démocratie, en renversant la monarchie en février 1848. La Deuxième République (I848-1851) est fondée, le suffrage universel masculin proclamé (1848), l'esclavage dans les colonies aboli (sur l'initiative de Victor Schœlcher), le droit au travail affirmé. D'un coup, le peuple entre à nouveau en politique : de 240 000 à la fin de la Monarchie de Juillet, le corps électoral atteint les 9 400 000. Une idéologie démocratique imprègne le libéralisme politique, en associant au principe de liberté celui d'égalité dont la grande bourgeoisie se souciait bien peu jusque là (cf. texte de F. Ozanam p.286 et 287).

Mais quand les Ateliers nationaux, destinés à procurer du travail aux chômeurs, sont fermés, la révolte ouvrière qui s'ensuit à Paris est noyée dans le sang, en juin, et la République devient extrêmement conservatrice, en s'appuyant sur les masses rurales et en réduisant le droit de vote.

Le premier président de la République, élu au suffrage universel, est un neveu de l’empereur, Louis-Napoléon Bonaparte. Il incarne le retour à l'ordre, avant de renverser le régime par un coup d'État le 2 décembre 1851, qu'il fait approuver par un plébiscite au suffrage universel rétabli.

Le Second Empire (1852-1870) préserve le suffrage universel, mais n'est en aucun cas un régime démocratique. Le droit de vote est dévoyé dans le plébiscite et dans la désignation de candidats officiels. Jusqu'en 1860, l'Empire est autoritaire, la presse sévèrement contrôlée et l'opposition musclée ou réduite à l'exil (Victor Hugo à Jersey). Puis le régime se libéralise : le droit d'adresse, le droit d’interpellation sont rendus aux parlementaires et en 1869, le Corps législatif retrouve l'initiative des lois. En 1870, le premier régime parlementaire de notre histoire rend le gouvernement responsable devant l'Assemblée, autrement dit, l'exécutif a besoin d'une majorité parlementaire pour pouvoir gouverner.

Ce libéralisme politique n'ignore plus la question sociale : en 1864, le gouvernement autorise la formation d'associations ouvrières et le droit de grève. Mais le régime n'est plus assez assuré pour résister à l'arrestation de l'empereur à Sedan le ler septembre 1870, par l'armée prussienne. Le 4 septembre, la III° République est proclamée à Paris par Léon Gambetta.

La III° République (1870-1940) connaît des débuts difficiles, amputée de l'Alsace et du nord de la Lorraine, menacée d'une restauration monarchique, avec une Assemblée nationale et un chef du pouvoir exécutif (Thiers) installés à Versailles, d'où part la terrible répression des Communards républicains et socialistes (20 à 35 000 exécutions en mai 1871).

La division des monarchistes entre légitimistes (partisans d'un Bourbon, au drapeau blanc) et orléanistes, la loi du septennat votée pour maintenir à la présidence de la République le légitimiste Mac Mahon permettent aux orléanistes et aux républicains de faire passer les " lois constitutionnelles " de 1875. L'amendement Wallon y inscrit la nature républicaine du régime. Peu à peu, les républicains conquièrent, grâce au suffrage universel, la Chambre des députés, le Sénat, puis la présidence de la République, à la suite d'une crise avec Mac Mahon. En 1879, la République est bien affermie. Elle se dote des symboles hérités de la Révolution : le 14 juillet devient fête nationale, la Marseillaise hymne national et Paris redevient capitale.

Les principes du libéralisme républicain posés, il faut leur donner corps. C'est l'époque des grandes lois républicaines : 1881, liberté de réunion et liberté de presse, gratuité de l'enseignement primaire, sous l'influence de Jules Ferry. Le chef du gouvernement fait voter en 1882 la loi sur l'obligation scolaire de 6 à 13 ans ainsi que la laïcité de l'enseignement public. L'instruction publique devient, avec la caserne, un moyen puissant de francisation des parlers (lutte contre les patois) et d'unité des comportements, au service d'un idéal républicain pétri de patriotisme, matérialisé par le " temple " municipal (l’hôtel de ville à l’architecture néo-classique), où le bon citoyen est un bon contribuable, prêt à se sacrifier pour la patrie. En 1884, les associations professionnelles, les syndicats, sont autorisés.

Le " ralliement " des catholiques et des conservateurs modérés, à partir de 1890, consolide la République. L'affaire Dreyfus (1894-1906) fait éclater les forces politiques en deux blocs, une droite nationaliste, cléricale, militariste et antisémite, et une gauche attachée aux droits de l'homme, à la démocratie, à la laïcité et au pacifisme. Au début du XX° siècle, les radicaux (" le petit père " Combs, farouchement anticlérical) interdisent l'enseignement aux congrégations et adoptent, en 1905, la loi de séparation des Églises et de l'État : la République ne reconnaît aucun culte, mais garantit l'exercice de tous. C'est le fondement de la laïcité française.

La République affermie, les républicains de diverses tendances politiques se retrouvent face à face. Les socialistes créent la SFIO (Section française de l'internationale socialiste) en 1905 et s'opposent aux radicaux. L'un de leurs chefs de file, le président du Conseil Clémenceau, réprime très durement des émeutes viticoles dans le Languedoc, la grève des cheminots, alors que les ouvriers revendiquent, chaque ler mai, la journée de 8 heures.

La III° République est démocratique, assise sur un régime parlementaire, mais son personnel politique est bourgeois, et s'appuie sur la plus grande part de la paysannerie et les 'couches nouvelles' d'employés, de cheminots, de petits commerçants, de propriétaires (cf. le texte de Gambetta, p. 310). Quant à la classe ouvrière, elle subit de nouvelles conditions d'exploitation à l'usine et la précarité de son sort, ce qui autorise le socialiste Jean Jaurès à revendiquer une véritable République sociale (cf. texte p. 299).

 

B) Révolutions industrielles : d’une France rurale à une France plus ouvrière et plus urbanisée (à partir de la 2ème moitié du XIX° siècle)

1) De l’invention à la mécanisation : un mode de production industriel

Tout comme l'Antiquité a inventé le verre, la vis d'Archimède, la catapulte, le palan, les engrenages, le moulin, la meule à grains, le Moyen Age la charrue, le collier d'épaule, la herse, la faïence, l'horloge et l'imprimerie, les inventions se sont poursuivies sous l'Ancien Régime (première ascension en ballon par les frères Montgolfier en 1783) et jusque dans les années révolutionnaires (télégraphe aérien de Claude Chappe sur les hauteurs de Belleville en 1793 et premières conserves alimentaires par N. Appert en 1795, c'est le procédé de l'appertisation). D'ailleurs, les écoles centrales créées en 1795 privilégient l'enseignement des sciences dans le secondaire.

La nouveauté du XIX° siècle, c'est que pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, ces innovations techniques peuvent se diffuser de façon massive, au point de transformer vie quotidienne et mode de production.

La clé de ce processus est la maîtrise de puissantes et nouvelles sources d'énergie : ainsi, la première révolution industrielle du début du XIX° associe la machine à vapeur au charbon. La seconde, qui prend le relais à la fin des années 1880, associe le moteur à explosion (découvert en 1886) au pétrole et à l'électricité. Grâce à d'énormes capitaux mobilisés par les premières banques de dépôt et d'affaires ouvertes sous le Second Empire (Crédit Lyonnais en 1863), aux prêts à l'industrie, la production industrielle fait des progrès considérables dans la métallurgie, la sidérurgie (la tour d'Eiffel est un monument de fer) et la chimie, au travers du chemin de fer, tandis que la mécanisation progresse partout. L'Exposition universelle de 1889, à Paris, est une formidable vitrine de ces progrès techniques, des premières automobiles à l'ascenseur électrique.

De nouveaux modes de distribution de produits plus abondants et plus diversifiés (les premiers grands magasins ouvrent sous le Second Empire), la constitution d'un véritable marché national, grâce au réseau ferroviaire, sont à la fois cause et conséquence de l'industrialisation, qui transforme aussi profondément la vie ouvrière.

2) De l'atelier à l'usine : un prolétariat dominé par la bourgeoisie

En effet, la révolution industrielle a pour cadre nouveau l'usine, et non plus l'atelier artisanal ou la grande manufacture dépourvue de machines. Certes, en 1914, 28% des travailleurs exercent encore leur activité chez eux, notamment les ouvrières du textile, mais cela n'empêche pas le développement des usines, même si la discipline nouvelle qu'elles entraînent est longtemps contestée, et les machines brisées. D'une façon générale, et même si les différences sont profondes entre le prolétariat d'usine et l'artisan qualifié, entre l'ouvrier rural à domicile et le mineur, la condition ouvrière a tendance à s'améliorer dans la deuxième moitié du XIX° siècle et au début du XX° : beaucoup de familles continuent de vivre dans des logements insalubres, nombre d'ouvriers n'ont que leur matelas pour seule richesse, mais ils mangent mieux, davantage de laitages et de viande. A partir de 1890, les gouvernements réduisent la journée de travail (10 heures à la veille de la guerre), suppriment le livret ouvrier, rétablissent le repos hebdomadaire (supprimé en 1880). Mais les assurances-accident, maladie, familiale et vieillesse sont inexistantes, sauf pour certaines catégories sociales très particulières.

Les revenus patronaux ont eux beaucoup plus vite augmenté, et une grande bourgeoisie d'affaires, capitaliste, apparue sous le Second Empire, vient étoffer les rangs des hauts fonctionnaires et des grands notables. La bourgeoisie dans son ensemble diffuse un mode de vie fait de goût pour le travail bien fait, en prenant son temps, pour les loisirs tranquilles, sensible pendant " la Belle Époque ". Le " folklore " de la civilisation rurale disparaît devant les progrès d'une culture-marchandise, urbaine et industrielle, marquée par le roman-feuilleton de la presse, le roman policier, le cinéma et le sport-compétition.

3) De la campagne aux faubourgs et aux banlieues : une société de plus en plus homogène et urbaine

Avant guerre, la société française reste majoritairement peuplée de ruraux, mais l'urbanisation progresse (31 % de citadins en 1870, 47% en 1911 ; la proportion sera renversée seulement à partir de 1928). Cette urbanisation est directement liée à l'industrialisation : elle est nourrie par l'exode rural qui se fixe dans les usines des faubourgs et des banlieues des cités industrielles. Usines, entrepôts, logements ouvriers s'installent à la périphérie sur des espaces plats bien desservis par les transports. La naissance de la banlieue crée les premières agglomérations : la ville absorbe les communes périphériques (Paris annexe ainsi les communes de Montmartre, Belleville, Grenelle... en 1860) gagnant encore en espace.

Des régions rurales entières se vident (les Alpes, le Massif Central) alors que de véritables régions industrielles se forment ou se développent autour des gisements de houille (dans le Nord, autour du Creusot ou de Saint Etienne), de l'hydroélectricité (Grenoble) ou de savoir-faire industriels anciens (Paris, Lyon, Lille, Rouen ... ) Alors que la France est entrée dans une période de stagnation démographique, les migrations d'Italiens, de Polonais (comme Marie Curie, née Sklodowska), de Belges viennent alimenter les recrutements d'ouvriers.

 

III) La France dans une Europe dominante

A) De la France des droits de l'homme...

Dès 1792, les Girondins souhaitent exporter la Révolution par la guerre. Au nom du " droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ", la Constituante annexe Avignon et le Comtat Venaissin, sur leur demande, tandis que les Conventionnels affirment que la France " accordera fraternité et secours à tous les peuples qui veulent reconquérir leur liberté ". En Savoie, en Belgique et sur la rive gauche du Rhin, dîme, corvées et droits seigneuriaux sont abolis. Sous le Directoire, Bonaparte reconstruit l'Europe en suscitant des " républiques sœurs " fondées sur l'égalité et la souveraineté populaire, en Hollande, en Suisse, en Italie. L'Empire permet la diffusion des principes révolutionnaires de 1789 dans toute l'Europe. Dans les pays conquis, le servage, les droits seigneuriaux, la dîme sont abolis, le Code civil appliqué. Même après la chute de l'Empire, les valeurs de liberté et d'égalité ne disparaissent pas.

Premier grand pays d'Europe à avoir instauré le suffrage universel et un régime républicain, la France, à la fin du siècle, exporte l'image modèle du pays de l'Égalité, de la Liberté, des droits de l'homme, de la Démocratie et de l'instruction. Les élites intellectuelles et diplomatiques de toute l'Europe et de l'Amérique latine usent du français, langue d'une culture et d'une civilisation particulièrement brillantes à Paris (peinture, littérature, musique, danse…)

B) ... à la France conquérante et coloniale

1) La " mission civilisatrice " de l'homme blanc

Éloignés du " premier empire ", peu mobiles, les Français ont longtemps été indifférents à l'expansion coloniale, qui demeure d'ailleurs mesurée jusqu'au Second Empire. Charles X conquiert Alger, et la Monarchie de Juillet le reste de l'Algérie, où ne cessent d'arriver des colons européens. Napoléon III étend l'influence française en Asie (colonie de Cochinchine, protectorat sur le Cambodge), en Océanie (Nouvelle-Calédonie), en Afrique (mise en valeur du Sénégal), tout en soutenant le percement du canal de Suez par Ferdinand de Lesseps.

La constitution du deuxième empire de la planète est surtout l'œuvre de la III° République, où s'impose un "parti colonial" qui réussit à intéresser les Français à la conquête. Richesses naturelles, comme le caoutchouc indochinois, indispensables à l'industrie, explorations décrites dans les journaux, concurrence anglaise ou allemande à relever, préoccupations missionnaires, ces arguments soutiennent la colonisation en Asie et en Afrique, avec la foi en une " mission civilisatrice de l'homme blanc ", d'autant plus forte que ce blanc est français et héritier des valeurs universelles de liberté et d'égalité.

Persuadé que " les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures " (cf. texte de Ferry p.320 et 321), Jules Ferry est ainsi un grand colonisateur, autant qu'un défenseur de l'instruction publique, au nom des mêmes valeurs de progrès et de raison. Peu après l'intervention de la France en Tunisie (1881), Jules Ferry impose un protectorat à l'Annam et au Tonkin. A la fin du siècle, c'est toute l'Indochine qui est sous la coupe de Paris. En Afrique noire, la France soumet à partir de 1875 (explorations de Savorgnan de Brazza) les territoires d'Afrique équatoriale, puis plus tard ceux d'Afrique occidentale autour du golfe de Guinée, avant d'annexer Madagascar et d'imposer un protectorat au Maroc en 1912.

A la veille de la Première guerre mondiale, l'empire (attention, le mot désigne une réalité d'ordre géographique, le régime de la France restant la République ... ) représente 10 millions de km2 et 50 millions d'habitants. Seul, l'empire britannique le surpasse.

2) L’exploitation et la domination coloniale

La colonisation française - plus largement européenne - se traduit par la mise en valeur des territoires dominés et par l'acculturation des populations soumises. Cette mise en valeur s'effectue au bénéfice exclusif de la métropole, qu'il s'agisse de l'exploitation des ressources naturelles, du développement d'une agriculture intensive d'exportation (viticulture en Algérie) ou de la construction des infrastructures (voies ferrées uniques à destination des ports, aménagés en capitale et en bases d'exportation). Souvent, cette mise en valeur s'accomplit avec le travail forcé des indigènes, malgré l'attitude plus respectueuse des populations locales de grands colonisateurs comme Brazza ou Lyautey en Indochine et au Maroc.

Le travail forcé, le statut de second ordre des indigènes - français mais non citoyens, à l'exception des " indigènes évolués " de quatre villes sénégalaises -, l'alphabétisation peu répandue et utilisée pour nourrir l'admiration de la puissance coloniale (cf. Tintin au Congo ...), tout cela relativise les réels progrès de l'hygiène (en partie grâce aux méthodes aseptiques mises au point par Louis Pasteur) et de la lutte antiesclavagiste. D'autant plus que l'argument humanitaire (l'interdiction des sacrifices humains au Dahomey, sous le dernier roi Béhanzin par exemple) s'accompagne d'atrocités dans la conquête, d’une sujétion de peuples entiers et de la déstructuration des sociétés traditionnelles, qui découvrent en quelques années la modernité, l'introduction de la monnaie, l'urbanisation et l'exode rural (avec les premiers bidonvilles dès le début du siècle). Cette violence fondamentale de la colonisation explique qu'elle a commencé à être rejetée, dès les lendemains de la Première guerre mondiale, et d'abord par l'élite indigène nourrie des valeurs d'égalité et de fraternité...